L’apprentissage est souvent rattaché au parcours et développement de la personne en bas âge jusqu’à la fin d’un parcours dit linéaire vers l’âge jeune adulte. Ainsi, l’apparition de la catégorie des jeunes professionnels crée une marque sur la ligne du temps et du plan proposé par une société performative. Cette référence nous informe qu’il existe ce parcours sans trop de pauses où le monde du travail est prêt à accueillir ces diplômés. Certes, gorgés de leur matière étudiée, mais également diplômés de leur réussite à ne pas avoir tergiversé quant à leur décision prise dans une adolescence inquiète et absorbante. Dans le même ordre d’idées, étudier quelque chose et devenir autre chose est perçu comme une perte de temps et un manquement à cette ligne droite que l’on nous suggère fortement. Comment s’en étonner si on nous demande dès notre première compote ou presque, ce qu’on voudrait être plus grand. Non, seulement, devons-nous le savoir, mais aussi garder le cap.

Je pense qu’en favorisant, récompensant, renforçant ce type de parcours profitable, la société met de côté une grande majorité d’humains apprenants ayant intégré que l’éducation se termine quand l’école ouvre et ferme ses portes. Ainsi, je crois que le retour aux études est un terme à revisiter si l’on concède que la curiosité n’a pas de fin et que la réflexion n’a pas de murs.

C’est en ayant reçu mon diagnostic à l’âge de 33 ans que j’ai senti le poids d’une renaissance et d’une reconstruction. Il est déstabilisant de faire ses premiers pas en tant que personne neurodivergente à un âge où l’on doit non seulement avoir appris à marcher mais aussi à savoir courir et même voler.

Mon parcours, comme celui de bien d’autres, est chaotique et finalement, je n’ai jamais su exactement ce que je voulais être plus grande. Or, j’ai toujours su ce que je ne voulais pas être. Au-delà de cette expression désabusée de l’école de la vie, il y a quelque chose de très anarchique dans le fait de faire quelque chose pour la première fois en dehors des âges dit scolarisables. Apprendre à l’âge adulte implique également de désapprendre certains réflexes mettant en veille notre capacité de simplement essayer.

Il faut savoir que les adultes qui décident de faire quelque chose pour la première fois se voient inévitablement pris dans un processus d’auto-jugement. Nous ne sommes plus une page blanche. C’est notre force et notre frein à la fois. Comme si se tromper était un jeu d’enfant et réussir un essentiel d’adulte. C’est peut-être là où la richesse de l’être se perd dans le paraître et la peur de ne pas être « bonne ou assez » se matérialise dans le stigma de l’éducation aux adultes et plus loin. Plus loin, comme avoir besoin d’aide et le demander. Avoir besoin de validation et le dire. Se tromper et en rire. Faire une bourde et s’excuser.

Je me suis rencontrée en tant que personne neuroatypique pour la première fois il y a environ deux ans. Je m’enfarge souvent mais faire quelque chose pour la première fois quand nos premières fois sont loin derrière soi, est le jeu le plus amusant que je connaisse.

Gabriela Ovallé

Blogueuse